Déclaration Préliminaire Intersyndicale SNPES-PJJ/FSU, UNSA-PJJ, CFDT-PJJ Au Comité Social d’Administration de la Protection Judiciaire de la Jeunesse du 30 mai 2024

 

28 mai 2024 

En audience de concertation relative à la « violence des mineurs » le 6 mai, le garde des Sceaux nous a annoncé les projets du gouvernement à l’encontre de la jeunesse la plus en difficulté de notre pays. Après les drames qui ont émaillé l’actualité récente, nous aurions pu espérer une augmentation des moyens dévolus à la protection de l’enfance et à la PJJ. 

En effet, un nombre croissant d’enfants est en attente de dispositifs de placement et d’accompagnements pour assurer leur protection. Cette réalité est criante et objectivable : 3 300 enfants attendent un placement en protection de l’enfance ! 

Or nous savons que si les moyens ne sont pas davantage mis du côté de la protection de l’enfance dans une politique de prévention, le risque d’un passage à l’acte à l’adolescence est plus important. 

Cette priorité s’efface malheureusement face à une démarche politique du gouvernement qui met uniquement la focale sur la délinquance. Cette fois-ci, rien d’objectivable, juste une course à l’idée la plus démagogue. 

Ces attaques s’incarnent aujourd’hui par des mesures visant clairement à ébranler les fondements même de la justice des mineur.es qui pose le postulat qu’un enfant n’est pas un adulte « modèle réduit ». Nous ne le laisserons pas détruire ce principe à valeur constitutionnelle qui préside aux missions de la protection judiciaire de la jeunesse ! 

Les mesures annoncées se déclinent principalement dans le cadre des objectifs visant à : 

Modifier l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs : élément central de la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989 dont la France est signataire. Et reconnu comme un principe fondamental à valeur constitutionnelle. 

Mettre en place des comparutions immédiates : un dispositif jusqu’à présent uniquement employé pour les majeurs, ce qui acterait donc la remise en cause de la spécialisation des mesures adaptées aux enfants et adolescent.es. Cette mesure serait également une attaque contre la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989.

Créer une composition pénale simplifiée pour les enfants et adolescent.es quand la peine encourue est de 3 ans maximum. Il s’agirait là d’outrepasser la spécialisation des juges des enfants pour venir renforcer encore le pouvoir du parquet au profit d’une politique plus répressive.

Au lieu de soutenir une politique d’éducation ambitieuse et émancipatrice pour sa jeunesse la plus en difficulté, le gouvernement fait le choix de mesures autoritaires dans l’unique objectif « qu’elle se tienne sage » !

Ces dispositions sont une attaque aux grands principes de l’ordonnance de 45 reprises par le CJPM : l’atténuation de la responsabilité en fonction de l’âge et la nécessité de rechercher le relèvement éducatif par des mesures adaptées à la personnalité des mineurs, prononcées par une juridiction spécialisée. Elles s’opposent tout autant à la vision d’une justice des mineurs « à part » que Robert Badinter a défendu toute sa vie. 

Quelles tristes ambitions répressives alors que la France atteint déjà des chiffres records d’incarcération des mineurs (831 le 1er avril 2024). 

Nous rappelons au gouvernement qu’un.e enfant ou adolescent.e qui commet des délits est avant tout un.e enfant ou adolescent.e en danger. Aujourd’hui, l’extrême indigence des dispositifs de la protection de l’enfance devrait encourager les pouvoirs publics à leur donner les moyens nécessaires plutôt que d’ajouter une couche supplémentaire aux mille-feuilles de mesures qui existent déjà. 

Nos trois organisations syndicales ne laisseront pas le gouvernement détruire la justice des mineur.es et refusent de siéger en CSA alors que la direction de la Protection Judiciaire de la Jeunesse assiste passivement au démantèlement de sa mission d’éducation ! Mme la présidente, vous devez prendre la mesure de la gravité de la situation et réaffirmer avec conviction le primat de l’éducatif sur le coercitif ainsi que la place de la PJJ dans les différents dispositifs de prise en charge des mineur.es.