Quand le gouvernement cible les jeunes ! Paris, le 23 avril 2024

Sous la présidence d’Emmanuel Macron, nous avons l’habitude d’annonces en mode réaction face à des situations ou sujets médiatisés. 

Dernièrement, au regard d’évènements particulièrement dramatiques, c’est la violence des jeunes qui est sous les projecteurs et pour laquelle des réponses fleurissent ici et là. La PJJ en bon petit soldat, après avoir mis en place le CJPM à marche forcée, nous apprend qu’elle a des projets en cours. Il s’agit de faire suite aux annonces du premier ministre qui souhaite apporter des réponses pour les mineurs de moins de 16 ans ainsi que des mesures pour responsabiliser les parents. 

Les projets : 

Une expérience de partenariat entre l’EN, la préfecture, la PJJ, le conseil départemental pour mettre en place un dispositif à destination des élèves en difficulté sur la base du volontariat dans une logique de cibler les décrocheurs scolaires. 

Rappelons que ce dispositif existe déjà sous la forme du partenariat PJJ/EN mené dans les UEAJ, procédure à destination des décrocheurs scolaires ! 

Le développement des internats scolaires, on nous l’a déjà servi avec les résultats que l’on connait ! 

AIC : action d’intérêt civique pour agrandir le panel des réponses pénales pour les procureurs en cas d’alternative aux poursuites (13/16). 

Là aussi, rappelons que les stages existent déjà et que la nouveauté consistant à intégrer une remobilisation scolaire ne peut justifier l’annonce d’un nouveau dispositif. D’autant plus que dans les faits les stages démontrent des possibilités d’adaptation selon les besoins repérés. 

Projet d’accueil de nuit en UEHC se situant entre le couvre-feu et le placement. 

Rappelons que nous défendons le placement dans son entièreté et non morcelé ! Cela n’a aucun sens ! Qui plus est, à l’heure où l’on manque déjà de places et où les ressources RH ne sont pas suffisantes ! 

Mais les annonces ne s’arrêtent pas là dans la mesure où désormais, c’est au principe d’atténuation de responsabilité que le gouvernement souhaite s’attaquer ! 

Le CJPM prévoit déjà que ce principe peut être écarté pour les plus de 16 ans ! Alors que veut-on de plus ? 

Qu’on ne se trompe pas, sous ces annonces tous azimuts, il y a bien une constance celle de démolir le travail social, responsabiliser les jeunes et incriminer les parents en cas de difficulté. 

Nous ne souhaitons soustraire personne face à ses responsabilités mais encore faudrait-il considérer le problème dans sa globalité ! 

Les jeunes qui étaient autrefois des enfants à protéger sont désormais des individus dangereux et violents. Alors la solution est de considérer qu’ils doivent répondre de leurs actes comme s’ils étaient des adultes. Nous sommes dans la logique du système ultra libéral où désormais tout repose sur la responsabilité individuelle. 

Quant à la responsabilité de l’Etat ? Elle est absente des radars… 

Pourtant nous assistons à un désengagement de l’Etat qui ne perçoit même plus le rôle qu’il doit tenir en matière de cohésion sociale. 

Que dire de la loi Taquet voulant réformer l’ASE de façon ambitieuse mais dont les décrets d’application ne sont toujours pas sortis ! Et que dire de la PJJ qui annonce des coupes dans son budget à hauteur de 37 millions ? 

Il en résulte une politique préventive exsangue…Si l’on prend l’exemple des départements, chacun gère les financements à sa guise donnant lieu ainsi à de véritables iniquités sur les territoires en matière de financement de l’ASE. Ainsi, des départements préfèrent privilégier des équipements auto routiers plutôt que des actions de prévention…Pire, certains départements pourtant excédentaires font le choix délibéré de ne pas accorder de crédits suffisants à l’ASE… 

Cela peut conduire à la mort de certaines équipes de prévention dans des banlieues sensibles. Mais cela peut conduire aussi à des prises en charge non effectuées alors que des placements ASE sont prononcés par les magistrats au titre de l’enfance en danger. 

Des placements non exécutés ou des mineurs qui attendent un an avant d’être placés alors qu’ils sont maltraités au domicile…Des jeunes placés à l’hôtel sans accompagnement dont certains se sont suicidés ces derniers temps ! 

Une politique de prévention exsangue avec comme conséquence l’arrivée de jeunes à la PJJ dans des états de plus en plus dégradés souvent couplés avec des problématiques psychiatriques. 

Alors qui est violent avec qui ? Oui monsieur Attal, il y a un vrai problème avec la jeunesse mais la responsabilité n’est pas là où vous la situez ! 

Et ce n’est pas en augmentant les caméras de surveillance et en instaurant des dispositifs de couvre-feu que vous règlerez le problème ! 

Comment la direction de la PJJ peut-elle croire en de tels dispositifs pour régler la question de la jeunesse en difficulté ? 

Plutôt que d’annoncer de nouveaux projets dont personne ne comprend le sens, la direction devrait réaffirmer les dispositifs qui fonctionnent et donner les moyens aux professionnels de travailler. 

Que ce soit les partenariats UEAJ/décrocheur scolaire, les classes relais…Mais aussi, des actions de prévention (expo 13/18-moi jeune citoyen) Quand on sait qu’elles ne sont pas comptabilisées dans l’activité du service pénalisant ainsi les unités qui les mettent en place ! 

C’est une gestion à la petite semaine car on sait que si la prévention n’est ni forcément visible ni quantifiable, elle paye sur le long terme. 

Madame la Directrice, ce sont d’autres annonces qu’attendent les professionnels, celles qui viseraient à mettre en lumière les missions de notre institution tout en les défendant et donnant un cap sur le long terme et des orientations claires. Madame la Directrice, comment expliquer cette forme d’invisibilité de notre institution auprès des politiques ? 

Béatrice Briout 
Secrétaire générale UNSa SPJJ